L’aïkido (合気道, aikidō?) est un art martial japonais (budo), fondé par Morihei Ueshiba entre 1925 et 1960. L’aïkido a été officiellement reconnu par le gouvernement japonais en 1940 sous le nom d’aikibudō1. Il a été créé à partir de l’expérience que son fondateur avait de l’enseignement des koryu (écoles d’arts martiaux anciennes), essentiellement le ju-jitsu de l’école daitō ryū, le kenjutsu2 (art du sabre japonais) et l’aikijutsu. L’aïkido est né de la rencontre entre ces techniques de combat et une réflexion métaphysique de Morihei Ueshiba sur le sens de la pratique martiale à l’ère moderne.

L’aïkido se compose de techniques avec armes et à mains nues utilisant la force de l’adversaire, ou plutôt son agressivité et sa volonté de nuire. Ces techniques visent non pas à vaincre l’adversaire, mais à réduire sa tentative d’agression à néant3. L’aïkido peut être considéré comme la concrétisation du concept de légitime défense : une réaction proportionnée et immédiate à une agression. En fait, dans l’esprit de l’aïkido, il n’y a pas de combat, puisque celui-ci se termine au moment même où il commence. Conformément à cette logique, il n’existe pas de compétition d’aïkido excepté dans le style Shodokan fondé par Kenji Tomiki (et de ce fait appelé aussi Tomiki ryu, École Tomiki).

Comme la plupart des budō modernes (judo, karaté, kendo…), l’aïkido est l’héritier des arts martiaux développés durant les périodes de guerre, qui furent modifiés lors des périodes de paix (ère Tokugawa) et de la disparition de la classe des samouraïs (restauration de Meiji).

Morihei Ueshiba était un fervent pratiquant shinto, et il avait par ailleurs une expérience réelle de la guerre : il participa à la Guerre russo-japonaise, et nombre de ses élèves moururent durant la Seconde Guerre mondiale. Son parcours, emblématique d’une authentique réalisation spirituelle, le conduisit à recevoir la révélation de nouvelles techniques martiales, et à devoir nous transmettre l’« art de paix », dont le but serait d’améliorer l’Homme, d’un point de vue physique mais surtout comportemental (tolérance et paix) et spirituel.

Le terme aïkido

Calligraphie des trois caractères composant le terme japonais « aikido »

Calligraphie des trois caractères formant le terme « aikido », de haut en bas : ai, ki, dō.

Le terme aïkido (aikidō en japonais) est composé de trois kanjis (lus en lecture chinoise) signifiant :

合 ai : du verbe au, concorder ; harmonie

気 ki : énergie

道 dō : la voie.

Aïkido peut donc se traduire par « la voie de la concordance des énergies »4.

En effet, le terme « concordance » est plus près du sens japonais original de l’aiki comme étant une action de rencontre (explicité dans la composition du kanji) que le terme « harmonisation ». L’« harmonie » peut être le résultat souhaité de la pratique de l’aïkido, mais on ne fait pas d’aïkido sans faire concorder les énergies. Comme le fait remarquer Olivier Gaurin5, l’aïkido, par la concordance (« mettre les cœurs ensemble »), amène à un résultat où il sera possible de communiquer avec l’« adversaire », chose impossible si on a dans l’idée de l’harmoniser (« amener à une entente, se mettre d’accord », ce qui peut être impossible) ou de le détruire. Un autre problème soulevé est qu’« harmonie » implique souvent une notion d’amitié ou de paix, ce qui est superflu (on ne peut pas être aimé par tout le monde, même si l’on aime soi-même tout le monde)5. Par exemple, les Japonais utilisent le mot wagō (和合) pour « harmonie », terme composé de « paix » et de « concorder » : en concordant vers la paix, on crée l’harmonie.

Pratique de l’aïkido

Tachi waza nikyō omote

c.-à-d. technique debout, deuxième principe, forme avant

L’aïkido est pratiqué par des femmes et des hommes de toutes tailles et âges. Le but de la pratique est de s’améliorer, de progresser (techniquement, physiquement et mentalement) dans la bonne humeur (le fondateur Morihei Ueshiba insistait beaucoup sur ce point). Ne sont montrées que des techniques respectant le partenaire6,5,7,8. La complexité de cet art demande un haut niveau de pratique dans son utilisation en combat réel. S’il est vrai que les techniques de base reposaient sur des pratiques académiques classiques et étaient adaptées à un style combatif, il reste que l’aïkido n’est pas une pratique pour apprendre à se battre mais un art martial qui permet de se préparer, autant physiquement (souplesse, rapidité, musculature), mentalement (rester calme en toutes circonstances) que techniquement (respecter la distance de sécurité, trouver l’ouverture, se placer, gérer plusieurs attaques simultanées) à l’éventualité d’attaques de toutes sortes (et pas seulement des attaques codifiées).

Il existe différents styles d’aïkido répondant à différentes aspirations. Le style le plus répandu est celui initié par le propre fils du fondateur, Kisshomaru Ueshiba, style connu sous le nom d’Aikikai. Cependant, pour comprendre l’existence d’écoles différentes, il faut prendre en compte le fait que le fondateur de l’aïkido a créé cet art martial et l’a développé tout au long de sa vie. L’évolution des techniques s’est faite jusqu’à la mort de Morihei Ueshiba qui eut de nombreux émules, des disciples qui ont donc propagé la technique d’un aïkido en perpétuelle évolution. Le fils du fondateur qui ne reçut que temporairement l’enseignement que son père ne cessa d’offrir à d’autres, ne pratique donc pas nécessairement la même technique que ces autres disciples. Il en est ainsi des autres maîtres, ce qui explique les différentes écoles. Ce n’est surtout pas un sport, mais une façon d’appréhender l’homme. Même s’il fut un soldat patriote et brillant, le fondateur de l’aïkido fut également un pacifiste convaincu, bien qu’il existe quelques controverses à ce sujet.

Rôle de l’attaquant (aïte, uke)

L’aïkido insiste sur le fait que, alors que tori exécute la technique d’aïkido et sort théoriquement « vainqueur » de chaque rencontre, l’attaquant gagne aussi en expérience en suivant correctement la technique, en étant de façon répétitive « projeté » ou amené au sol et subissant une clef. La plupart du temps, le terme aïte est préféré en aïkido à celui de uke, car le pratiquant progresse et travaille quelle que soit sa situation et son rôle dans la pratique. Même en tant qu’attaquant, il faut être attentif et prêt, ce qui correspond plus au terme de aïte alors que pour l’aïkido uke est plus passif.

Aïte doit rester actif en permanence et toujours garder une attitude martiale, comme s’il cherchait en permanence une faille pour frapper, bloquer, ou retourner la situation ; il existe d’ailleurs des techniques de retournement (kaeshi waza), aïte ne pouvant retourner la situation que s’il a une attitude « parfaite ». La tentative d’échapper à l’action de tori est par ailleurs le moteur de certains mouvements, comme irimi nage : aïte est amené vers le sol en pivotant, et lorsqu’il essaie de se rétablir, tori utilise ce mouvement pour le projeter en arrière, s’il n’essayait pas de se rétablir, aïte serait en bien plus mauvaise posture puisque dans l’impossibilité de parer un atemi.

Grâce à son travail en tant qu’aïte, un pratiquant apprend indirectement les sensations de tori. La progression se faisant dans le même temps pour tori et aïte. Même s’il existe une certaine codification du travail d’aïte, tori doit être en mesure de pratiquer l’aïkido avec des non aïkidokas.

La pratique des armes

Travail au bâton contre mains nues : le pratiquant de gauche neutralise une attaque au bâton du pratiquant de droite et l’amène à une chute.

En plus des techniques à main nues, l’aïkido comporte l’étude du maniement d’armes en bois : le sabre ou bokken, le bâton ou jō, le couteau ou tantō, et de façon plus anecdotique le juken (baïonnette), arme dans laquelle excellait le fondateur et qui lui avait valu d’en être formateur à l’armée.

Le fondateur a réuni dans le jō des techniques de lance, de sabre et de naginata (fauchard). La technique de sabre qu’il a développée est singulièrement différente du kenjutsu des koryu (écoles traditionnelles). C’est surtout à l’étude de cette dernière que le fondateur consacra son énergie en ce qui concerne les armes.

Forme, attitude et efficacité martiale

L’enseignement de l’aïkido se fait essentiellement par la répétition de techniques de base. La maîtrise de chaque point d’une technique est indispensable à son fonctionnement. Le but de ces formes est aussi de travailler l’attitude19. En effet, un mouvement ne peut être réussi que si :

tori est toujours stable, il doit donc avoir une attitude « parfaite » (shisei – 姿勢) ;

tori gère les ouvertures (possibilités d’attaque) et fermetures (empêcher uke de contre-attaquer), en gérant les distances, les directions et le rythme du mouvement (maai – 間合) ;

tori coordonne ses mouvements et les harmonise pour maîtriser uke sans que celui-ci rencontre une opposition qui lui permettrait de se raffermir (aiki) ;

uke est toujours en déséquilibre, ce qui implique un travail sur les directions, l’extension des bras et la continuité du mouvement (ki no nagare).

 Cette attitude est très importante et indispensable aux progrès. Dans un combat réel, un mouvement ne présentant pas la plus parfaite exactitude est inefficace. L’efficacité martiale, pour un aïkidoka, ne réside pas dans l’agressivité qui mène à la destruction, mais dans l’attitude.

 Une des manières d’évaluer la justesse martiale est de marquer des atemi (coups) (par exemple lancer la main ouverte ou le poing vers le visage du partenaire pour simuler un coup de poing) : si tori a la possibilité de frapper, c’est que son attitude est correcte, et si uke peut frapper, c’est que tori a fait une erreur. Le port de tels coups est indispensable sur certaines techniques, la réaction de uke à ce coup étant utilisée. Mais il n’est pas nécessaire de porter réellement ces coups. Certaines branches de l’aïkido vont jusqu’à supprimer le marquage des atemi, ce qui n’est pas sans susciter des controverses[réf. nécessaire].

C’est ainsi que l’aïkido peut se prétendre à la fois « martial » et « non-violent » : il n’est pas nécessaire d’être violent pour être efficace martialement, l’être est même contre-productif en aïkido.

Pour des raisons pédagogiques, les mouvements sont parfois montrés avec une grande amplitude, alors qu’en combat réel les mouvements courts sont plus efficaces (rapidité et économie d’énergie). Les mouvements se raccourcissent spontanément avec la tension nerveuse (stress) de l’agression, ils raccourcissent également au fur et à mesure de la progression du pratiquant.

La pratique régulière et assidue de l’aïkido permet aussi de préparer un individu physiquement (souplesse, rapidité, musculature), mentalement (calme et maîtrise de soi) et techniquement (respect de la distance de sécurité, ouverture, placement, gestion de plusieurs attaques simultanées). Les grades

Articles détaillés : Ceinture dans les budo et Grade dan.

 Le système des grades dan dans les Budō est développé au Japon par Jigorō Kanō dès le XIXe siècle afin de remplacer le système traditionnel de certificats d’aptitude permettant d’enseigner (soit en succédant au maître, soit en fondant sa propre école). Cela en créant des étapes intermédiaires, plus modernes et progressives, les grades kyū et dan. Les élèves d’Ueshiba d’avant-guerre n’ont pas eu de grades dan semble-t-il, mais des certificats dits menkyo kaiden.

 Dans certaines écoles d’aïkido (car ce n’est pas systématique19), le débutant se voit attribuer le grade sixième kyū, puis progresse jusqu’au premier kyū. Les passages de grade kyū se font au dojo (lieu de pratique) par le professeur lui-même. Puis, le pratiquant passe le premier dan (devant un jury ou son professeur en fonction des écoles et/ou des pays), le grade le plus élevé étant le dixième dan (accordé uniquement à titre posthume ou exceptionnellement pour des personnes de très haut niveau).

 Il n’existe en aïkido que deux couleurs de ceinture : blanc et noir. On porte la ceinture blanche du sixième au premier kyū, puis la ceinture noire à partir du premier dan. Certains dojo utilisent des ceintures de couleurs (blanc, jaune, orange, vert, bleu, marron, noir) différentes pour marquer le niveau, et ainsi donner des repères de progression aux jeunes pratiquants, parfois aussi aux adultes.

 Le “hakama” était la tenue traditionnelle au Japon, elle devrait donc être portée par tout le monde. Il est dit que Ô sensei interdisait quiconque ne portant pas le “hakama” à entrer dans le dojo, même les visiteurs. Cependant pendant la période d’après guerre, les élèves ne pouvaient plus se payer les “hakama”, Ô sensei autorisa donc ses élèves à pratiquer sans “hakama” le temps qu’ils économisent pour s’en payer un. Depuis lors certains de ses élèves ont cru que le “hakama” avait une portée honorifique. C’est pour cela qu’aujourd’hui beaucoup de professeurs autorisent le port du hakama lorsqu’il estime que le pratiquant ai atteint un niveau suffisant. Selon les dojos, cela se fait au troisième kyū (équivalent de la ceinture verte au judo) ou au premier kyū (équivalent à la ceinture marron) ou avant (voir “La tenue” ci-dessus). Toutefois, certaines écoles ne l’autorisent qu’à partir du premier dan. “Quand le maître montre la lune, le sot regarde le doigt”

La ceinture noire n’est pas une marque de maîtrise, le pratiquant de niveau premier dan est un étudiant (shodan) qui a acquis les bases. Les usages peuvent toutefois varier d’une école à l’autre. Dans certains dojo, l’étude, qu’on appelle bukiwaza, des techniques avec armes (bokken, jō, etc.) est considérée comme indissociable de l’étude des techniques à mains nues (taijutsu). Une progression en parallèle dans ces deux domaines est obligatoire ; on ne peut, par exemple, prétendre passer le troisième kyū en taijutsu si l’on n’a pas atteint au minimum le quatrième kyū en bukiwaza, et inversement, de sorte qu’il y a à tout moment au plus un kyū, ou un dan, de différence entre le niveau dans ces deux domaines de pratique.

Laisser un commentaire

*

Actualité – Evenements – Culture